Participaient à cette table ronde :
M. Jean-Pol BARAS, délégué général Wallonie- Bruxelles à Paris
M. Andras DERDAK, directeur de l’Institut hongrois de Paris
M. Petrika IONESCO, metteur en scène
S.E. M. Pavel FISCHER, ambassadeur de la république tchèque
S.E. M. Stanislaw CIENUCH, ancien ambassadeur de Pologne
S.E. M. Jean GUEGUINOU, ambassadeur de France, ancien ambassadeur auprès de l’UNESCO
Lecture d’un message de M. Jacques Toubon, ancien ministre, député européen
S. E.M. Stanislaw CIENUCH
Permettez-moi de commencer par une profession de foi qui m’a conduit à apprendre le français dans ma jeunesse d’une manière autodidacte. Ce qui m’a motivé, c’était surtout les valeurs et le contenu humain et culturel que le français véhicule : sa faculté à exprimer une certaine vision de l’homme, son message de liberté et la pluralité. A l’époque, parler français, était a mes yeux une manière de vivre et de penser différente, une façon de voir le monde autrement. C’était donner à ce monde un sens supplémentaire. Elargir les frontières imaginaires de la liberté auxquelles on aspirait tant sous le régime communiste.
Je suis très honoré et très heureux d’avoir la possibilité de participer à ce colloque « Vers une nouvelle francophonie en Europe ? » Je voudrais remercier les organisateurs de Cercle Richelieu Senghor de Paris pour l’invitation, et en particulier Monsieur Henry de Suremain, dont les efforts professionnels et personnels pour le changement en Europe Centrale et Orientale et pour la francophonie méritent d’être soulignés.
Les présentations des orateurs qui m’ont précédé et notre discussion ont montré des succès et des progrès mais aussi des difficultés et des faiblesses dans le développement de la francophonie en Europe. Nous avons pu avoir un tableau assez exhaustif des situations dans des pays différents. Les hauts représentants de l’administration française ont parlé des initiatives et des décisions concrètes prises par les autorités françaises.
On peut espérer que notre réflexion commune critique et autocritique ainsi que nos activités futures communes et efficaces nous apporterons des résultats positifs pour la promotion et le renforcement de l’usage de la langue française. Nous sommes tous conscients qu’il reste encore beaucoup à faire, surtout dans les pays de l’Europe Centrale et Orientale.
Il me semble, que j’ai une bonne compréhension de la situation en Pologne et en Ukraine. Croyez-moi, un francophone intéressé n’a qu’ un accès limité aux livres et a la littérature françaises dans des grandes métropoles comme Kiev, Donetsk, Odessa, ou Varsovie, Cracovie, Gdansk, sans parler des plus petites villes de provinces et les Instituts, les réseaux de l’Alliance Françaises et les Ecoles Françaises sont confrontés à des difficultés bien connues, particulièrement budgétaires.
Permettez-moi de formuler dans ce contexte une observation supplémentaire fondée sur ma propre expérience. Les élèves français et étrangers dans les écoles françaises, par exemple au collège de Kiev et au lycée de Varsovie, n’ont pas la possibilité d’apprendre sérieusement la langue nationale, l’ukrainien ou le polonais. A mon avis, il faudrait entreprendre des efforts pour changer cette situation. Ce sera aussi un argument pour rendre plus crédible les efforts pour la promotion de la langue française dans ces pays.
Depuis ces dernières années, on observe une évolution positive de la Francophonie institutionnelle qui a marqué des points grâce à deux initiatives : sa prise en compte du plurilinguisme, son combat en faveur de la diversité culturelle.
Apprendre une langue, c’est côtoyer des contextes différents, des problématiques et des enjeux pluriels. Le plurilinguisme représente l’un des trésors de l’Europe et doit devenir un instrument majeur de coopération au même titre que le droit, la gestion, ou la connaissance de l’histoire.
La mondialisation est un autre défi difficile pour notre cause. Elle a changé la donne de la Francophonie. Avec elle, la Francophonie est passée de la langue à la culture, de la culture à la politique, de la politique à l’économie.
Cette réflexion m’amène à aborder un autre concept qui, me semble-t-il, doit avoir une place de premier choix en matière de relation internationale. Je pense à l’éthique. La réflexion éthique doit répondre à la question que nous nous posons entre ce que nous devrions faire, et ce que nous faisons. La Francophonie politique, peu importe ce que recouvre le terme politique, ne peut entrer en action sans avoir répondu au préalable à la question de savoir quel est le fossé qui sépare ce qu’elle fait de ce qu’elle doit faire pour construire un monde plus humain.
Quand elle se fonde sur les valeurs comme le développement durable, la diversité culturelle, le dialogue des cultures et la solidarité, expression fondamentale de notre devoir de coopération, je pense que la Francophonie est alors sur la voie d’une éthique que nous pourrions qualifier de responsable.
Dans le monde actuel s’affiche certes un renouveau de la revendication démocratique, mais la pauvreté y progresse, les inégalités s’y accroissent, les identités, surtout quand elles sont minoritaires, sont malmenées. La montée en puissance du terrorisme et les nouvelles formes de croisade qu’il engendre attisent la haine et les divisions, et le repli sur soi.
C’est dans ce contexte que l’on oppose courageusement le multilatéralisme à l’hégémonisme ; le dialogue des civilisations, la diversité culturelle et linguistique au repli identitaire ; le partage régulé et maîtrisé des richesses à la loi pure et dure du marché et du profit, et que l’on redécouvre le discours et les valeurs des pères fondateurs de la Francophonie.
L’Europe est un terrain stratégique pour nous, d’abord parce qu’elle est le berceau de la langue française et ensuite parce qu’elle est paradoxalement une nouvelle frontière pour la Francophonie. L’Europe doit montrer l’exemple. L’OIF doit accroître son influence auprès des institutions européennes pour promouvoir des relations internationales beaucoup plus efficaces.
Pour terminer, je voudrais partager avec vous ma sensibilité de Polonais et d’Européen. Les pays de l’Europe Centrale et Orientale ont toujours lutté pour sauvegarder leur culture nationale face aux empires germanique, ottoman, russe puis soviétique, et sont aujourd’hui porteur du lourd héritage du communisme. La mission de l’OIF est appréciée pour sa promotion du pluralisme culturel et linguistique dans le respect de la souveraineté des Etats, des réformes politiques et économiques, des valeurs reposant sur les libertés, les droits de l’homme et la tolérance. Malgré cela, l’OIF n’est pas très reconnue dans le monde. En effet, cette organisation ne dispose pas d’une force militaire ou d’une possibilité d’action économique. Elle ne fonde pas son identité par le droit international, la charte de la Francophonie n’étant qu’un support juridique. L’OIF a donc besoin d’un leadership fort. Ceci étant dit, cette institution dispose de nombreux atouts pour s’imposer comme un acteur de la scène internationale. En s’appuyant sur ses réseaux issus de la société civile, l’OIF peut s’imposer comme un acteur pluriel. Pour autant, sa stratégie d’influence reste à définir. Pour conclure, la mission de l’OIF est appréciée pour sa promotion du multilinguisme et des valeurs.
Petrika IONESCO
Je suis arrivé clandestinement en France en 1970. J’ai vécu dans la rue pendant deux années avant de faire une carrière dans l’opéra. A cette époque, la France était un espace d’accueil pour les artistes. J’ai demandé l’asile politique mais la France ne nous a accordé aucune aide. Malgré cela, la France restait une destination privilégiée.
J’ai appris le français en Roumanie, mais également aux Etats-Unis grâce à mon père qui y était ambassadeur de Roumanie. A l’époque de mon départ de Roumanie, les trois-quarts des roumains parlaient le français. Si ce pays avait pu voter pour devenir une région française, j’estime que le vote aurait été positif. Je rappelle à cet égard que Napoléon III est le père fondateur de la patrie roumaine et que la plupart des familles obligeaient leurs enfants à faire leurs études en français.
J’ai été choisi pour monter un spectacle dans le cadre du Sommet de la Francophonie organisé à Bucarest en 2006. A cette occasion, je suis retourné en Roumanie pour la première fois depuis mon arrivée en France. Je me suis alors aperçu que l’anglais était devenu la deuxième langue étrangère en Roumanie ; il devient la langue de communication universelle. J’attire donc votre attention sur la Roumanie, au sein de laquelle la pratique de la langue française a fortement régressé. Tous les documents sont rédigés en anglais, les interventions sont effectués dans cette langues, alors même que la France est le premier investisseur dans ce pays. Un véritable travail de francophonie est nécessaire.
Ceci étant dit, de nombreuses personnes souhaitent apprendre le français, car il est considéré comme la langue d’une élite. Cependant beaucoup se sont plaint du manque de moyens pour apprendre cette langue. En effet, les chaînes roumaines diffusent peu de débats et d’informations en langue française et favorisent les séries américaines et la publicité. Les chaînes françaises n’existent plus et la seule qui reste est TV5, dont le contenu est limité.
Andras DERDAK
En Hongrie, le français est traditionnellement la deuxième ou troisième langue étrangère. Le pays avait toujours (à l’exception des 40 années du socialisme et de l’occupation soviétique) une orientation culturelle germanique. Cette orientation semble actuellement se tourner, comme dans beaucoup du pays du monde, vers la culture anglo-saxonne. Au début du XXe siècle, avec l’allemand, le français symbolisait l’intellect moderne, le libéralisme, l’occident. Pendant la période du socialisme, grâce à la popularité du Parti Communiste, la France passait pour le pays le moins impérialiste, et l’enseignement du français était moins problématique pour le régime que l’enseignement de l’anglais par exemple. Depuis 1990, l’anglais gagne du terrain et semble devenir la langue étrangère dominante. Comme le latin au Moyen Age, l’anglais est aujourd’hui la langue universelle, et les autres langues ont de grandes difficultés à survivre en tant que langues de communication internationale. Il y a quinze ans, la Hongrie comptait douze départements de français dans l’enseignement supérieur, aujourd’hui il n’y en a plus que huit dont quatre n’ont pas suffisamment d’étudiants pour pouvoir continuer à long terme. Ceci révèle une forte chute de l’intérêt des étudiants hongrois pour la langue française, et constitue un grand danger pour l’avenir de l’enseignement du français dans les écoles et les lycées hongrois.
En général, les bibliothèques sont relativement bien fournies en livres et revues français, quoique la dernière décennie ait été marquée par la baisse des commandes, pour des raisons essentiellement financières. La bibliothèque (riche et diversifiée) de l’Institut français de Budapest est ouverte pour un large public. L’éditeur L’Harmattan possède une filiale en Hongrie, et il existe une librairie française à Budapest. Chez les marchands de journaux, on peut trouver le Monde, rarement des magazines féminins et plus souvent le Journal Francophone de Budapest. Les télévisions françaises ne sont pas gâtées : dans les bouquets de programmes proposés par les fournisseurs de câble, TV5 Europe et Mezzo sont intégrés seulement dans les formules les plus fournies, c’est-à-dire les plus chères.
L’Institut français de Budapest est très actif et au niveau culturel, et au niveau de l’enseignement. Il soutient les événements scientifiques interuniversitaires, distribue un grand nombre de bourses, finance partiellement le Centre interuniversitaire d’études françaises (CIEH), qui est le centre de documentation pédagogique de l’enseignement du français en Hongrie, et organise beaucoup d’événements culturels, dont un grand nombre trouve son écho dans la presse hongroise.
Les hongrois s’intéressent à la Francophonie notamment parce que la France, depuis déjà deux décennies, figure parmi les cinq plus importants investisseurs en Hongrie. Certains des collaborateurs hongrois des entreprises présentes dans le pays doivent parler français, mais l’omniprésence de l’anglais rend souvent cette connaissance superflue. A part l’intérêt économique, il reste l’intérêt culturel qui est en chute actuellement. Le français compte parmi les langues étrangères européennes relativement difficiles, étant donné que son écriture et sa prononciation sont très différentes du hongrois. L’image traditionnelle du français (langue littéraire, langue des amoureux, langue diplomatique, langue de la Poste et des Chemins de fer) reste encore gravée dans le subconscient collectif, mais les jeunes générations ne semblent pas la connaitre.
L’enseignement du français n’est pas privilégié par le gouvernement hongrois. On ne peut donc pas parler d’une Francophonie institutionnelle. La plupart des enfants qui se mettent à l’apprentissage du français y sont poussés par leurs parents ayant une relation affective avec la culture et la langue française ou avec la France.
La Hongrie a rejoint l’OIF à l’époque où le premier ministre était Péter Medgyessy, homme politique francophone et francophile. Ce genre de personne est rare dans la société hongroise. La politique hongroise est, en fonction du caractère du gouvernement, en général, d’orientation anglophile ou germanophile. Cependant, la Hongrie souhaite établir les meilleures relations avec la France et les pays francophones. Par ailleurs, le rôle de l’OIF est plus important au niveau diplomatique. Cet organisme est également très important pour le développement des contacts économiques.
L’Institut Hongrois de Paris et l’OIF n’ont jamais travaillé ensemble. Il faut savoir que 45 instituts culturels étrangers sont présents à Paris, ce qui en fait la Ville qui accueille le plus d’instituts de ce type dans le monde. Vous pouvez constater avec fierté que tout le monde souhaite venir à Paris. En outre, la plupart des instituts étrangers travaillent en français. Comme l’Institut Hongrois de Paris travaille pour les français, il est logique qu’il utilise la langue française. Selon moi, il est important de renforcer les liens entre ces instituts. La volonté est présente, mais il est dommage que nous soyons de plus en plus confrontés à des problèmes budgétaires. En effet, depuis le début des années 1990, l’Institut Français de Budapest est l’un des plus importants lieux culturels de notre ville. En Hongrie, la France est considérée comme le pays de la culture en Europe. Il est donc primordial que vous conserviez et assumiez ce rôle avec fierté.
Jean-Pol BARAS
BRAUDEL estimait que la France passait d’abord par la langue française, comme vecteur de la communication. Marco Polo avait dicté son Livre des Merveilles en français, tandis que c’est dans cette langue que Leibniz et même Casanova ont rédigé leurs ouvrages. Ces éléments témoignent de l’universalité du français et nous rendent fiers d’apprendre cette langue, qui est parlée sur les cinq continents. Il existe donc une véritable francophonie spontanée et nous aimerions que la France elle-même s’en rende compte.
Je rappelle à cet égard un extrait du premier alinéa de la charte de la Francophonie :
« La Francophonie, consciente des liens que crée entre ses membres le partage de la langue française et des valeurs universelles, et souhaitant les utiliser au service de la paix, de la coopération, de la solidarité et du développement durable, a pour objectifs d’aider à l’instauration et au développement de la démocratie, à la prévention, à la gestion et au règlement des conflits, et au soutien à l’État de droit et aux droits de l’Homme, ainsi qu’à l’intensification du dialogue des cultures et des civilisations. »
Selon moi, le français, autrefois vecteur de la communication, devient le créateur de la diversité culturelle, un concept unique et probablement inédit que seule pouvait engendrer la Francophonie, qui peut aider l’Europe à respecter les peuples de l’ensemble de la planète.
S.E.M. Pavel FISCHER
Pour la république Tchèque, le développement du français représente en quelque sorte un retour aux sources, après la chute du Mur de Berlin. En effet, la francophonie était autrefois très développée en Tchécoslovaquie, que ce soit dans la littérature ou dans la vie publique. Par ailleurs, cette orientation se fonde également sur une francophonie choisie. La prédominance économique de l’Allemagne génère un renforcement de l’allemand, tandis que l’anglais progresse. Nous cherchons donc une offre alternative et le français devient à cet égard un choix du cœur. Vous ne vous rendez pas compte à quel point vous êtes déjà riches de cette maîtrise du français.
Après 1989, la France a investi dans l’apprentissage du français dans notre enseignement primaire et secondaire. Ce choix judicieux a été l’une des raisons de la décision de mon pays de demander le statut d’observateur au sein de l’OIF. Elle reposait également sur l’investissement de cet organisme, que je souhaite remercier aujourd’hui, pour l’apprentissage du français. Entre 2001 et 2007, la pratique de la langue française a augmenté de 45 % en République Tchèque. D’après les sondages officiels, de nombreuses personnes ont été attirées par cette langue. Des étudiants ont obtenu des doubles diplômes valables dans nos deux pays. Le marché du travail est nourri de ce bilinguisme. Cette adhésion à la Francophonie nous a permis d’observer le monde et de conceptualiser le monde à travers la culture française. La pratique du français fait ainsi de notre pays un champion de notre région. A la veille de la présidence de l’Union Européenne par la République Tchèque, cette francophonie représente un atout non négligeable et je vous remercie de nous avoir accompagnés dans cette démarche.
Pour ma part, j’ai été scolarisé en France. Les souvenirs associés à ce pays m’ont imprégné de cette culture française, associée pour moi à une certaine idée de la liberté.
S.E.M. Jean GUEGUINOU
L’élargissement de la Francophonie en Europe a créé une situation nouvelle pour le monde francophone qui ne rassemblait jusqu’alors que des pays dont la population tout entière, ou une grande partie de celle-ci, parlait le français et l’utilisait dans sa vie quotidienne. L’espace francophone tel que l’a dessiné l’OIF comprend des pays où le français n’est plus connu que par un petit nombre, même s’il y fut autrefois plus répandu. Le français y est, pourrait-on dire, une langue choisie.
Par ailleurs la Francophonie a été d’abord principalement franco-africaine (même si on ne peut oublier le Canada et le Québec). Elle s’est élargie ensuite à l’Asie Océanie. Son extension à l’Europe Centrale et Orientale et dans les Balkans lui donne une nature différente et plus universelle.
Cette universalité se constate dans les négociations internationales lorsque la Francophonie décide de faire bloc, défend des positions vigoureuses, s’affirme comme partenaire incontournable. C’est ce qui s’est passé par exemple à l’UNESCO lors de la longue négociation qui a abouti à l’adoption d’une convention sur la diversité culturelle. L’OIF s’y est d’ailleurs exprimé souvent en tant que telle par la voix de son secrétaire général le Président Abdou Diouf.
L’adhésion de nombreux Etats européens à la Francophonie a d’ailleurs été une manière pour eux d’affirmer une identité dans un univers en voie de mondialisation, d’assumer un héritage culturel, de proclamer un attachement fort à certaines valeurs dont la Francophonie est à la fois le symbole et le vecteur, de faire partie d’une organisation, l’OIF, qui a une originalité et des ambitions spécifiques.
L’espace francophone n’est pas un espace figé. Il s’est défini à un moment de l’histoire de l’après-guerre et de la décolonisation. Il se doit d’évoluer. Il le fait. Il le fait en abordant souvent des domaines nouveaux. Il le fait en acceptant d’y recevoir des nouveaux membres qui lui apportent beaucoup et reçoivent beaucoup de lui.
L’arrivée massive des pays d’Europe Centrale et Orientale a modifié le paysage général de la Francophonie. Il s’agit d’une nouvelle forme de Francophonie, la diversité change d’aspect. Comme toute organisation internationale, l’OIF se doit d’évoluer avec son temps. Il faut donc continuer dans cette voie.
Message de M. Jacques TOUBON, ancien ministre, député européen, lu par Anne MAGNANT
M. Jacques Toubon devait participer à cette dernière table ronde. Il n’a pas pu venir mais nous a adressé un message qu’il m’a demandé de vous lire :
Les questions que vous posez cet après-midi sont à la fois pertinentes et paradoxales. Les demandes de rapprochement avec l’OIF se multiplient, alors même que l’influence de la langue et de la culture française en Europe s’avère déclinante. Je tenterai une explication, parce que la Francophonie sous toutes ses formes apparaît comme une réponse libre et différente à l’évolution du monde :
• libre, car sous l’influence de la diplomatie française, susceptible de se comporter de manière non alignée – je pense à l’épisode de la guerre d’Irak en 2003, qui continue à occuper les esprits de ceux qui veulent un ordre international plus équitable qui fonctionne selon les principes du multilatéralisme ;
• différente, parce que la Francophonie, c’est l’aire géographique et spirituelle qui refuse l’uniformisation culturelle, qui prône, à l’extérieur comme à l’intérieur, le respect des identités et la préservation de la diversité.
De mon point de vue, l’OIF, avec au premier rang mon pays la France, doit répondre positivement aux sollicitations dont elle est l’objet. Elle doit en particulier continuer à proclamer une autre conception des valeurs que celles qui viennent de faire faillite sur les marchés financiers mondialisés. Tout ne s’achète pas et tout ne se mesure pas à l’apparence. Elle doit appuyer les efforts de la France et de certains de ses partenaires dans la direction d’une véritable politique européenne de sécurité et de défense.
Enfin, il faut promouvoir l’apprentissage du français, comme langue de référence. La France, en ce domaine, a le devoir d’intensifier sa politique et de développer son réseau culturel, ce vers quoi se tournent nombre de pays amis que je salue. C’est la famille de la Francophonie, au sein de laquelle la France doit montrer l’exemple.