M. Michel de BONNECORSE / Les crises en Afrique francophone, où en est-on ?

Monsieur Michel de BONNECORSE, Ancien ambassadeur.

L’Afrique demeure le continent oublié de la « mondialisation » alors que l’Asie en est le principal bénéficiaire. Depuis 5 ans une interaction spectaculaire rapproche les deux continents bouleversant les positions acquises et dessinant de nouveaux équilibres.

Pour les pays africains l’impact est considérable mais pour la Chine ou l’Inde, il est marginal (pétrole excepté). Le continent noir n’est plus seul face à l’Europe. La Chine apparaît de plus en plus comme le modèle alternatif. La question qui nous retiendra est celle des répercussions de ce phénomène sur le partenaire historique qu’est la France en Afrique mais nous en limiterons le champ aux seuls aspects économiques.

I – Le constat

Depuis quelques années, l’Inde s’est tourné vers l’Afrique pour mieux profiter de la mondialisation et assurer son approvisionnement. On assiste même à une concurrence assez vive avec Pékin en matière énergétique. Elle a également besoin de l’Afrique pour soutenir sa revendication d’un siège permanent au Conseil de Sécurité. Cependant, la présence indienne en Afrique étant pour l’instant sur tous les compteurs voisine de 10 % par rapport à celle de la Chine on se concentrera sur cette dernière.

1) La pénétration économique chinoise est organisée et volontariste.

Elle repose sur 3 objectifs :

– Politique : marginaliser Taïwan longtemps implanté en Afrique, et assurer plus encore son statut de grande puissance et de membre permanent des Nations Unies (53 Etats en Afrique).

– Accès aux ressources naturelles : 25 % des importations pétrolières chinoises proviennent d’Afrique et 20 % des minerais. 2/3 du bois importé en Chine viennent du continent.

– Commercial : la Chine est le premier fournisseur en Afrique noire (11 %) devant la France. Elle est son troisième partenaire commercial. Les échanges ont été quadruplés en 3 ans au niveau de 50 milliards de dollars et représenteraient 100 milliards de dollars en 2010.

Cette pénétration est coordonnée selon une stratégie décidée au niveau politique. L’aide au développement en appuie les objectifs. La moitié de l’APD chinoise est orientée vers l’Afrique. Elle est ciblée sur les grands projets énergétiques, miniers et d’infrastructures, notamment le BTP, obtenus grâce à des crédits concessionnels de grande ampleur. Par ailleurs, l’aide chinoise, de l’ordre de 10 milliards de $ pour l’Afrique, est liée à 70 %. Finalement, les objectifs de Pékin ne sont pas éloignés de ceux de Washington encore que la diplomatie américaine poursuit également un objectif politique sécuritaire.

2) Elle est très appréciée des Africains

Des dirigeants en premier lieu qui sont séduits par l’absence de conditionnalité politique, par le volume et la panoplie des instruments financiers, et par des délais de mise en place auxquels les bailleurs traditionnels ne les ont pas habitués. Mais les populations font aussi grand cas des produits chinois qui leur permettent d’accéder à un nouveau type de consommation, notamment pour l’électronique et l’équipement (la mobylette chinoise coûte 50% moins cher que la Peugeot).

Globalement, les investissements et les importations asiatiques de ressources africaines (énergie, minerais, bois) poussent à la hausse les produits de base et stimulent l’ensemble de l’économie. En outre, l’offre chinoise de biens d’équipement et de produits de consommation améliore le pouvoir d’achat des Africains en exerçant une pression à la baisse des prix. La Chine séduit également en se présentant comme un modèle pour l’Afrique et un grand frère partisan de la coopération Sud-Sud par nature solidaire. C’est à ce titre qu’elle a décidé d’étendre la « préférence commerciale » pour l’Afrique à 442 produits africains qui seront exemptés de droits de douane.

Enfin, il faut souligner que tous les opérateurs chinois étant de la sphère publique, ils n’hésitent pas à prendre sur des projets importants des risques que les multinationales refusent. Il y a donc des mises en valeur qui ne peuvent être effectuées que par les Chinois. C’est un effet additionnel qu’on a tendance à oublier bien qu’il soit primordial.

3) L’impact sur les intérêts économiques français

Nos entreprises voient leurs positions fragilisées, particulièrement dans le bâtiment et les travaux publics, l’énergie ou les télécommunications. Dans ces secteurs, les entreprises asiatiques ont un avantage incontestable en terme de coûts de main d’œuvre, et une compétence technique qui s’améliore. Les entreprises chinoises sont soutenues par des prêts liés, mais emportent aussi de plus en plus souvent des marchés financés par d’autres bailleurs en raison du comparatif des prix (au Sénégal, un consortium Sino-Sénégalais l’a emporté sur Fougerolle pour la construction d’une autoroute en étant moins–disant de 35 %).

C’est ainsi que la Chine, avec près de 12 %, a gagné en 3 ans des parts de marché au détriment de certains pays européens : la France perd 1,5 point et le Royaume-Uni 1 point, l’Allemagne est en légère progression et les autres pays émergents en forte progression : Brésil (+ 1,8) et Inde (+ 1).

La Chine remporte des contrats au détriment des opérateurs français dans tous les secteurs d’activités y compris la santé (médicaments génériques au Kenya et à Madagascar).

Cependant les deux secteurs où les intérêts français sont les plus menacés sont le BTP et les télécoms. (En Angola, une ligne de crédit de 5 milliards de $ récemment promise par Pékin devrait ôter toutes nos chances pour la construction de l’aéroport et de 3000 km de voie ferrée).
Pour le secteur tertiaire, il faut noter que l’essentiel des placements financiers en provenance d’Afrique se détourne du secteur bancaire européen (en raison de la transparence) au profit des places moyen-orientales.

Il ne faut toutefois pas surestimer la menace des nouveaux acteurs. La France conserve dans de nombreux pays des parts de marché très supérieures à celle de la Chine. Il convient aussi de garder à l’esprit :

– que dans le domaine énergétique nos deux grandes entreprises, Total et GDF, s’approvisionnent pour une part importante en Afrique et pour des raisons d’équilibre géographique limitent leurs ambitions pour ne pas être surexposées sur le continent ;
– que dans le domaine minier, nous ne disposons plus de groupe d’envergure et sommes absents mondialement de la compétition à deux exceptions près : le manganèse et l’uranium avec Eramet et Areva (Gabon, Niger) ;
– qu’une partie de la distribution des produits chinois en hausse vertigineuse est effectuée par des sociétés de commerce françaises ou des ressortissants français qui participent ainsi à l’essor du marché (c’est notamment le cas de la CFAO) ;
– que sur financements français, depuis le déliement de notre aide, 7 % seulement des marchés, en volume, ont été attribués aux entreprises chinoises ;
– qu’en matière commerciale, si nos parts s’érodent, elles augmentent en volume.

Il faut relativiser : nous n’assistons pas à un choc frontal sur le marché africain entre les deux acteurs économiques que sont la France et la Chine mais à une érosion en notre défaveur.

Il nous faut cependant réagir.

 

II- La conduite à tenir.

La forte présence de nouveaux acteurs en Afrique est incontestablement positive pour le continent. La réussite de la Chine, manifeste depuis 3 ans, soulève cependant des questions de fond que Pékin devra résoudre.

1) La pénétration chinoise victime de son succès ?

La politique de Pékin est certes un succès :

– seuls 5 pays africains continuent à reconnaître Taïwan (sur 53) ;
– en 2005, la Chine est devenue le premier fournisseur de l’Afrique Noire ;
– 600 entreprises chinoises sont implantées en Afrique et de nombreux petits commerces ;
– sur le plan politique, la présence chinoise est de plus en plus marquée et son influence sur les dossiers africains de plus en plus forte : participation à de nombreuses OMP et pressions décisives au Conseil de Sécurité sur les crises ouvertes (Soudan, Côte d’Ivoire) ou les dossiers chauds (Sahara occidental) ;
– en 2005 au premier sommet Chine-Afrique, 40 chefs d’Etat et de gouvernement africains se pressaient à Pékin soit autant qu’au Sommet de Cannes.

Mais elle soulève une inquiétude générale :

En Afrique :

En dépit d’un a priori très favorable, de plus en plus de responsables africains s’interrogent sur l’activisme des nouveaux partenaires qui peut fragiliser à terme les économies africaines.

Ils mettent en avant :

– la mise en place d’une économie de rente limitée dans le temps et empêchant la diversification de l’économie ;
– une fragilisation du tissu industriel local par les exportations chinoises (textiles) : 10.000 emplois supprimés au Bostwana et 50.000 en Afrique du Sud ;
– l’exploitation abusive des ressources naturelles et les atteintes à l’environnement (forêts, gisements miniers) ;
– l’absence de création de valeur ajoutée ;
– le recours à grande échelle à des travailleurs chinois sur les grands chantiers y compris pour les ouvriers (Algérie, Sahel) ;
– le fait que les projets chinois ne créent ni emplois décents ni diffusion de technologies.

Ces critiques se répandent dans la société africaine, notamment relayées par les ONG locales. Elles expliquent un certain nombre de troubles dont ont été victimes ces derniers mois les chinois au Gabon, en Angola et notamment au Mali où, suite à une émeute liée à une défaite sportive, les commerçants chinois ont seuls été pillés.

Enfin, il y a une prise de conscience très rapide des menaces liées à l’immigration chinoise. Il y a désormais entre 500.000 et 700.000 Chinois en Afrique dont la moitié sont des irréguliers qui concurrencent fortement les activités informelles des Africains. Ces travailleurs que rien ne rebute évincent les Africains des « petits boulots » (y compris dans la fabrication et la vente de spécialités tels que les gâteaux et les beignets), ce qui laisse présager des troubles sérieux avec les femmes sénégalaises ou camerounaises fortement concurrencées.

Dans la communauté internationale :

Les pays de l’OCDE et les institutions internationales dénoncent de plus en plus vigoureusement le fait que l’aide chinoise déroge aux règles de bonne conduite des bailleurs traditionnels.

Ils soulignent :

– que sur le plan politique, la Chine appuie ouvertement les Etats africains les moins fréquentables (Soudan, Angola, Zimbabwe) ;
– que l’aide est pour l’essentiel liée ;
– que le cadre strictement bilatéral et peu transparent favorise la corruption ;
– que les entreprises chinoises ignorent les normes sociales, environnementales et de sécurité (notamment exploitation forestière et minière).

Ils dénoncent surtout la posture chinoise qui consiste à faire « cavalier seul » en matière d’aide et de proposer un « guichet » de financement alternatif.

Ainsi en 2005, le G8 a décidé d’annuler 50 milliards de $ de dette multilatérale au bénéfice de 42 pays pauvres très endettés (PPTE) et a établi un code de conduite pour éviter un ré-endettement immédiat.

La Chine en ignorant cette règle logique profite de la nouvelle capacité d’endettement pour mettre en place des prêts liés pour des montants importants (Angola, Congo).

Il s’agit de concurrence déloyale par laquelle Pékin devient un « passager clandestin » du mouvement des Occidentaux d’apurement de la dette et pourrait précipiter une nouvelle crise financière.

2) Quelles peuvent être les réponses françaises ?

– D’abord maintenir un engagement prioritaire pour l’Afrique et augmenter la part de notre aide bilatérale.

La France ne doit pas devenir un acteur parmi d’autres en Afrique mais rester par sa présence politique et par le volume de son APD dans le trio de tête des bailleurs dans l’ensemble des zones régionales.

Elle ne doit pas se fondre progressivement au sein de financements multilatéraux mais chercher à augmenter le pourcentage de son aide bilatérale, seul moyen véritable d’influence. L’idéal serait que l’accroissement des flux financiers de notre APD qu’imposent à la fois la fin des annulations de dette et l’engagement vers l’objectif de 0,7 % soit essentiellement consacrée à l’abondement de nos crédits bilatéraux. Il y a une tendance actuelle à baisser les bras et à passer le relais. Il faut réagir, sinon nous serons absents de secteurs entiers tout en y consacrant des crédits publics importants (exemple du Fonds Sida).

La baisse de notre clé de répartition au FED pourrait faciliter le transfert de ressources supplémentaires pour le bilatéral, d’autant que l’aide européenne est de plus en plus critiquée en Afrique.

– Etablir un dialogue avec nos partenaires africains au niveau politique pour les conduire à adopter des approches durables en matière de dette, de gestion des ressources naturelles, et d’environnement.

Ce dialogue n’est pas facile car les Présidents africains considèrent que nous les mettons en garde contre des pratiques dont nous avons nous-même usé en Afrique pendant des décennies. L’un des thèmes de ce dialogue pourrait par exemple être « l’Afrique peut elle continuer à exporter ses matières premières sans les transformer ? ». Ce dialogue doit également être mené avec les organisations africaines (UA, organisations régionales et NEPAD).

C’est d’abord aux Africains qu’il revient d’obtenir des Chinois des conditions commerciales et d’ADP décentes.

Ne pourrait-on pas proposer une étude commune UE/UA/OCDE sur « les nouvelles tendances de l’aide à l’Afrique » qui permettrait de mieux éclairer les pratiques chinoises ?

Toujours est-il que les difficultés de la Commission à faire accepter les APE par les dirigeants africains démontrent que désormais le dialogue approfondi avec eux est impératif.

– Mieux utiliser le cadre européen.

Adossée aux moyens importants du FED, la voix de l’UE peut être mieux écoutée en Afrique surtout si la coordination des bailleurs européens est renforcée. Ce pourrait être un des objectifs de la Présidence française 2008. Cette mobilisation concertée de nos efforts ne peut que renforcer la crédibilité européenne face aux ambitions des acteurs émergents. Le commissaire Louis Michel en est lui-même convaincu.

– Il faut adapter les mécanismes français.

Nous devons continuer à observer les marchés avec le MEDEF, notamment ceux financés par d’autres bailleurs, mais surtout nous adapter pour élaborer des réponses appropriées.

Ainsi, l’AFD vient d’adapter les procédures d’appels d’offres qu’elle préconise aux maîtres d’ouvrage pour éviter que des opérateurs peu scrupuleux tirent parti de la concurrence ouverte. Elle a renforcé ses exigences en matière de transparence, de normes sociales, d’indépendance des entreprises vis-à-vis des Etats et d’emploi local.

Pour préserver les intérêts français, il faut toutefois se garder de la tentation de lier à nouveau l’aide française. Notre crédibilité en Afrique serait très amoindrie si nous remettions en cause le déliement car il est très clairement dans l’intérêt des pays bénéficiaires. D’ailleurs, l’impact d’un retour en arrière serait très limité compte tenu des avantages comparatifs des entreprises chinoises.

La réponse la plus appropriée consiste en une nouvelle hiérarchie des projets que nous finançons. Il faudrait élaborer de nouvelles grilles qui tiennent compte des besoins de nos partenaires et des secteurs où la Chine et l’Inde n’ont pas d’avantages comparatifs décisifs. En clair, il faut abandonner le béton pour la technologie, l’ingénierie et la sophistication.

– Mais c’est aux entreprises ou aux opérateurs français qu’appartient une grande part de la réponse : à eux de se rapprocher des Chinois en une association, sous-traitance, intermédiation. Tout cela est plus aisé qu’on le croit car en pays francophones, les Chinois ont besoin de notre expertise (au Gabon, ils ont sollicité une participation d’un groupe français à un projet minier). N’oublions pas que même en Asie, des entreprises françaises -généralement des PME- sont sous-traitantes de firmes chinoises (Kazakhstan, notamment). La Chine est un grand pays mais qui reste circonspecte devant le « risque africain ».

– Approfondir le dialogue avec la Chine.

La question de l’Afrique doit désormais figurer dans tous les agendas franco-chinois sous une forme ou sous une autre. Mieux vaut sans doute l’aborder avec prudence. Outre la nécessité bien comprise de ne pas stigmatiser inutilement la Chine, trois précautions paraissent devoir être observées tout particulièrement dans un cadre multilatéral :

– évoquer le rôle de bailleurs émergents en Afrique et non de la seule Chine ;
– ne pas présenter ces débats comme limités à l’Afrique (pour éviter de paraître défendre notre « pré-carré »).

Après tout, les IDE chinois se portent pour 30% en Amérique latine contre 10% en Afrique.

L’idéal serait de pousser la Chine, au nom de ses responsabilités de grande puissance, à consacrer l’essentiel de son APD au multilatéral au détriment de son aide bilatérale. Il faut conduire nos partenaires à cette approche qui priverait Pékin d’une partie de son levier d’influence.

Mais c’est avant tout dans le cadre de l’OCDE et du G8 que nous devons agir.

– A L’OCDE

D’une manière générale, nos partenaires y partagent notre analyse concernant la pénétration chinoise sur le continent. Par ailleurs, la Chine a des relations anciennes avec l’OCDE (1995) et elle fait partie du Centre de développement de l’organisation. Il faudrait la conduire à se rapprocher du CAD qui regroupe les pays membres fournisseurs d’APD, pour l’amener dans un premier temps, à fournir des statistiques standardisées sur son aide publique, puis à terme à s’inspirer des engagements des membres du CAD en matière d’aide.

La plupart de ces engagements sont contenus dans la Déclaration de Paris (CAD 2005). Il faut pousser la Chine et l’Inde à se rallier à cette déclaration, ce qui n’est pas impensable dans la mesure où d’autres membres du G5 s’y sont montrés ouverts (Mexique, Brésil, Afrique du Sud).

L’OCDE pourrait d’ailleurs pousser l’idée de rencontres fréquentes au niveau d’experts ou de ministres entre les pays du G5 et du G8 sur ces sujets.

– AU G8

Il est envisagé que le prochain sommet du G8 aborde le thème « Chine et développement ». La question est actuellement à l’ordre du jour des réunions des Sherpas.

Nous devrions convaincre nos partenaires d’effectivement en débattre. Il faudrait que le G8 présente 3 requêtes à la Chine (et aux autres pays émergents) :

– ne plus faire cavalier seul en matière de prêts et se rallier à la notion de « prêt responsable » ;
– augmenter significativement leurs contributions aux grands fonds multilatéraux. La Chine, par exemple, ne contribue pas à l’AID qui est le guichet de la BM destiné aux pays les plus pauvres et dont 50% des engagements sont dirigés vers l’Afrique. Le message doit être clair : si la Chine se veut un partenaire de l’Afrique, elle ne peut être absente de l’AID. C’est une question de responsabilité ;
– mettre en œuvre les bonnes pratiques APD (cf. supra le paragraphe OCDE) et ne pas hésiter le cas échéant à faire intervenir la Banque Mondiale pour qu’elle lie ponctuellement ses « facilités » au respect par certaines capitales africaines de normes minimales (Brazzaville).

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Dans les années à venir, les positions de la Chine seront défiées par de nouveaux acteurs qui auront tiré les leçons du caractère abrupt du jeu chinois. Déjà, le Président Wade déclare préférer l’approche indienne. Déjà la Russie, dont la montée en puissance est prévisible en Afrique, se choisit des cibles (Nigéria) en tenant un discours critique sur tous les acteurs actuels et en se préparant à une offensive d’envergure.

Les avancées que nous attendons des pays émergents, notamment de la Chine, seront sans doute longues à obtenir et mesurées. Il paraît exclu que cette dernière renonce rapidement à son refus de prendre en compte la qualité de la gouvernance politique. Elle est cependant inscrite dans la logique compte tenu du contexte des critiques montantes dans la société civile africaine contre les pratiques chinoises. Elles seront d’autant plus facilitées que les Chefs d’Etat africains seront mis en garde de façon adroite contre ces excès. La diplomatie française est particulièrement qualifiée pour le faire d’autant plus que nous n’avons jamais caché que l’irruption des nouveaux acteurs est globalement un phénomène très positif pour l’Afrique et sans doute à terme pour les Africains.

Recommandations :

  • Langage de la diplomatie française :- reconnaître clairement et publiquement que l’arrivée de nouveaux acteurs dans le commerce et l’APD est un facteur positif pour l’Afrique ;
    – appeler les responsables africains et les nouveaux intervenants à respecter un cadre minimal de règles de gouvernance et de développement durable pour leur coopération ;
    – faire inscrire sur tous les agendas multilatéraux la question générale des bonnes pratiques de l’APD.

 

  • Adaptation de notre aide :- l’objectif de 0,70 % ne doit pas être abandonné ;
    – renforcer notre aide bilatérale notamment vers les pays francophones ;
    – accentuer nos financements vers des secteurs plus sophistiqués et techniques ;
    – rechercher avec les entreprises françaises établies en Afrique des partenariats avec celles des nouveaux pays intervenant en Afrique ;
    – développer notre coopération scientifique et les bourses en France.

 

  • Inscrire notre action diplomatique dans un cadre multilatéral :- L’UE : profiter de la Présidence française pour ajuster l’attitude de la Commission sur cette question ;
    – Le G8 : La question des règles de base de l’APD doit figurer au Sommet ainsi que celle de la participation de la Chine au guichet de l’AID ;
    – L’OCDE : c’est sans doute le cadre le plus approprié pour un dialogue positif sur cette question avec les nouveaux acteurs en Afrique. Nous devrions y jouer un rôle pilote./.
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