M. Pierre-André WILTZER / La Francophonie peut-elle être un acteur de la paix dans le monde ?

Monsieur Pierre-André WILTZER, Ancien Ministre de la Coopération et de la Francophonie.

De quoi parle-t-on quand on parle de la Francophonie ?

• Etymologiquement, la francophonie c’est l’ensemble des personnes qui, dans le monde, emploient la langue française. On les évalue à 175 millions environ aujourd’hui (sur un total de la population des Etats-membres de l’OIF de 710 millions), dont 110 millions de francophones réels, c’est-à-dire pratiquant le français comme leur langue principale et habituelle. On y ajoute 65 millions de francophones partiels, c’est-à-dire ayant une bonne connaissance du français et aptes à s’exprimer aisément dans cette langue, même s’ils en utilisent aussi une autre. C’est notamment le cas dans des pays où le bilinguisme est pratiqué, comme le Canada par exemple.
• Mais la Francophonie, avec un « F » majuscule, c’est aujourd’hui une organisation internationale structurée qui est un acteur présent sur la scène mondiale. C’est la Francophonie, entendue dans ce sens, dont je parlerai ce soir puisque le sujet que les responsables du Cercle Richelieu-Senghor m’ont demandé d’évoquer est : « La Francophonie peut-elle être un acteur de la paix dans le monde ? ».
L’ »Organisation Internationale de la Francophonie » s’est construite progressivement, au long des quarante dernières années. Comme vous le savez, la paternité de ce projet revient à quatre fondateurs à qui on ne rendra jamais assez hommage : Léopold Sédar Senghor, bien sûr, mais aussi le tunisien Habib Bourguiba, le nigérien Hamani Diori et le Prince cambodgien Norodom Sihanouk.
C’est à leur force de conviction que l’on doit la création de la première institution francophone, l’Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT) en 1970.

Depuis lors, l’Organisation s’est peu à peu renforcée, en particulier avec les Sommets des Chefs d’Etat et de Gouvernement des pays francophones, dont le 1er s’est réuni à Versailles en 1986. Le Sommet qui vient de se tenir à Bucarest, en Roumanie, les 28 et 29 septembre est le 11ème.

Sommet après Sommet, la Francophonie n’a cessé de se renforcer et de s’élargir :

Elargissement du champ de ses activités d’abord :

A l’origine, la Francophonie avait pour vocation de réunir les pays qui avaient entre eux des liens culturels étroits reposant sur une langue commune et une histoire partagée avec la France. C’était particulièrement le cas des Etats africains issus de l’ancien empire colonial français, auxquels s’ajoutait le Canada, du fait de la présence dans ce grand pays fédéral de communautés francophones importantes et notamment du poids du Québec. Pour des raisons identiques, la Belgique et la Suisse en ont fait partie d’emblée. Ce sont donc l’éducation et la culture qui ont été, au départ, au cœur de la démarche de la Francophonie, avec la volonté d’affirmer et de promouvoir la langue française comme langue internationale, en face de l’anglais ou plus exactement de l’anglo-américain.

Mais, avec le temps, l’objectif initial s’est étendu à des domaines nouveaux, en même temps que la Francophonie se dotait d’instruments eux aussi nouveaux : un réseau structuré d’universités francophones ou ayant en leur sein des départements d’enseignement en français et concernant la culture et la langue françaises (ce réseau est aujourd’hui animé et soutenu par l’Agence Universitaire de la Francophonie) ; une chaîne de télévision internationale francophone, TV5 Monde ; de même l’Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT), devenue l’Agence Intergouvernementale de la Francophonie (AIF), a développé ses programmes et ses financements dans de nouveaux domaines, en particulier l’aide à la mise en place ou le renforcement des institutions concourant au développement de la démocratie et de l’état de droit : systèmes électoraux, institutions parlementaires et judiciaires, amélioration de la bonne gouvernance. Cette Agence est aujourd’hui intégrée au sein du Secrétariat Général de la Francophonie. De même l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF), qui s’emploie à développer la coopération décentralisée entre les collectivités locales, est un opérateur de la Francophonie.

Parallèlement, les Parlements des pays francophones avaient créé une organisation internationale, l’Association Internationale des Parlementaires de Langue Française (AIPLF, devenue aujourd’hui l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie, APF), qui a joué un rôle d’aiguillon pour renforcer les structures et les initiatives de la Francophonie.
Un tournant important a été pris lors du Sommet de la Francophonie de Cotonou (Bénin) en 1995 avec la décision de créer un poste de Secrétaire Général de la Francophonie, chargé de coordonner tous les opérateurs de la Francophonie et d’incarner l’organisation sur la scène internationale.

Au Sommet suivant, réuni à Hanoi (Vietnam) en 1997, M. Boutros BOUTROS-GHALI, ancien Secrétaire Général des Nations Unies, de nationalité égyptienne, a été désigné comme premier Secrétaire Général de la Francophonie.
Le second tournant important dans l’histoire de la Francophonie a été pris en 2002 au Sommet de Beyrouth (Liban) qui a vu le Président Abdou Diouf accéder au poste de Secrétaire Général ; à cette occasion la Francophonie a délibérément choisi une démarche politique. D’abord en s’appuyant sur un thème central qu’elle n’avait cessé de promouvoir au cours de la période précédente : celui de la diversité culturelle.

Partant de l’idée que les langues et les cultures devaient pouvoir être protégées contre les effets de la domination des forces du marché et particulièrement des grandes compagnies anglo-saxonnes dans le domaine des biens culturels (édition, cinéma, productions audiovisuelles, nouvelles technologies de communication et d’information), la Francophonie a affirmé à Beyrouth que le respect des identités culturelles et linguistiques était un moyen essentiel pour éviter le « choc des civilisations » et pour prévenir le danger des frustrations provoquées dans les peuples qui seraient privés des moyens d’exprimer leur propre vision du monde et de préserver leurs cultures.
Pour la première fois, également, la Francophonie a adopté des positions communes sur certains sujets de politique internationale et notamment sur certaines situations de crises ou de conflits : le Proche-Orient, les risques d’une intervention militaire en Irak, la crise en Côte d’Ivoire.

Si l’on ajoute que l’Organisation Internationale de la Francophonie s’est emparée également, au fil des Sommets de Chefs d’Etat et de Gouvernement, de thèmes comme ceux du développement des pays pauvres, de l’environnement, de l’endettement des pays du sud, du défi que représente l’insertion dans la société d’une jeunesse nombreuse mais mal préparée, on voit que l’élargissement du champ des activités et des ambitions de la Francophonie est une réalité impressionnante. Elle est devenue aujourd’hui une Organisation Internationale de nature politique et à vocation générale.
La Francophonie a aussi connu, simultanément, un autre élargissement : celui de ses membres.

J’ai rappelé ce qu’était sa composition à ses débuts. Or, avec le temps et à mesure qu’elle se structurait, un nombre croissant de pays ont demandé à adhérer à l’Organisation Internationale de la Francophonie. Pour beaucoup de nouveaux adhérents, elle est apparue comme un pôle de résistance en face du risque d’uniformisation culturelle, un risque accru par la puissance des moyens modernes de diffusion et de production des biens culturels, si les règles de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) devaient s’appliquer aux biens culturels.
On a clairement vu se manifester cette réaction lors des négociations très dures qui se sont déroulées au sein de l’UNESCO et qui ont abouti au vote massif de la Convention sur la diversité culturelle en 2005 (seuls les Etats-Unis et Israël votant contre). La Francophonie a joué un rôle essentiel dans cette bataille.

Au Sommet de Bucarest, 63 pays étaient présents, 53 en tant qu’Etats-membres et 10 en tant que pays observateurs. Au cours de ce Sommet, de nouvelles adhésions ont été acceptées -Voir en annexe la liste des membres de l’OIF à l’issue du Sommet des 28 et 29 septembre 2006 à BUCAREST (Roumanie)- Quelle appréciation peut-on porter sur le fait qu’un nombre croissant de pays ait voulu rejoindre l’OIF ?
Une appréciation positive à première vue, car ce phénomène démontre la vitalité de l’Organisation. Il démontre aussi que les valeurs et les objectifs qui sont les siens rencontrent un écho favorable sur tous les continents. Il peut enfin renforcer l’influence de l’OIF sur la scène internationale en raison du poids qu’elle a acquis.

Mais le double élargissement qu’a connu l’OIF, celui des domaines dans lesquels elle veut s’impliquer et celui du nombre de ses membres, soulève aussi des interrogations, et notamment deux interrogations principales :

1) compte tenu des modestes moyens dont elle dispose, l’OIF est-elle en mesure d’embrasser réellement toutes les problématiques correspondant à ses ambitions ?
2) la grande diversité des membres de l’Organisation, dont seule une minorité sont des pays réellement francophones, ne risque-t-elle pas de nuire à la cohérence de ses positions et de ses actions ?
C’est donc la question de crédibilité de l’Organisation qui risque de se poser.

Je voudrais illustrer ce propos par quelques réflexions personnelles sur le rôle de l’OIF dans le domaine de la prévention et du traitement des crises et des conflits.
On retrouve sur ce sujet la problématique que j’ai décrite, à grands traits, en évoquant l’évolution de la Francophonie : caractère évolutif de l’appropriation par l’OIF de ces questions et ampleur des ambitions affichées.

C’est au Sommet de la Francophonie réuni à Moncton (Canada) en 1999 que l’on trouve solennellement affirmé l’engagement de la Francophonie dans le domaine de la prévention des conflits, de la paix et de la sécurité internationale.

L’année suivante, une conférence spéciale se réunit à Bamako (Mali) pour définir plus précisément cet engagement et ses modalités. La Déclaration de Bamako, adoptée en novembre 2000, demeure le texte de référence de l’OIF en la matière.

En 2004, lors du Sommet de Ouagadougou, (Burkina-Faso), une déclaration est adoptée par les Chefs d’Etat et du Gouvernement : s’appuyant sur les principes déjà définis, cette déclaration de Ouagadougou va plus loin en affirmant la volonté des pays francophones de contribuer à la prévention et au traitement des crises survenant dans l’espace francophone, en se référant à la notion de « responsabilité de protéger » les populations menacées ou atteintes par les conflits.

En novembre 2005, un « Symposium international sur les pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone », baptisé « Bamako+5 » puisqu’il se tient à Bamako cinq ans après la Déclaration de Bamako, manifeste à nouveau la volonté de la Francophonie d’agir en faveur du renforcement de l’état de droit, considéré –à juste titre d’ailleurs- comme la meilleure des préventions de crise.

En mai 2006, une Conférence des pays de la Francophonie, au niveau des Ministres, se tient à Saint-Boniface (Canada) pour préparer le texte d’une nouvelle déclaration à soumettre au Sommet de Bucarest.
Cette énumération démontre à elle seule l’importance qu’a prise la question de la préservation de la paix et du traitement des crises au sein de l’OIF. Il faut dire que, parmi les Etats membres de l’Organisation, plusieurs, et pas des moindres, sont atteints par des crises déclarées parfois très graves : la Côte d’Ivoire, Haïti, la République Démocratique du Congo, le Liban.

D’autres sont dans des situations de grande fragilité : le Tchad (conséquence du conflit du Darfour, au Soudan voisin), la République Centrafricaine (en partie pour la même raison), la Guinée (pour des motifs de blocage politique interne), les Comores (qui sortent d’une période d’incertitude et de tensions entres les îles qui les composent).
On comprend dès lors que l’OIF veuille contribuer activement à prendre des mesures préventives ou participer à la résolution des conflits déclarés.

Elle s’appuie, pour cela, sur ses principes fondateurs, qui sont rappelés dans la déclaration adoptée par la Conférence ministérielle de Saint-Boniface. C’est en particulier l’idée que « l’instauration du dialogue pacifique des cultures et des civilisations, de même que l’affermissement de la solidarité entre les nations, sont de nature à réduire les tensions, à prévenir les conflits et à renforcer la lutte contre le terrorisme ».

Et également l’idée que « le multilatéralisme est le cadre privilégié de la coopération internationale » et que « le développement économique et social est un élément-clé de la préservation structurelle des crises ».
De ces principes découlent un certain nombre de décisions ou d’orientations contenues, elles aussi, dans cette déclaration de Saint-Boniface, dernier texte en date qui définit les positions de l’OIF dans le domaine de la préservation de la paix.

> Par exemple, il est demandé au Secrétaire Général de « rendre opérationnel le mécanisme d’observation et d’évaluation permanentes des pratiques de la démocratie, des droits et libertés dans l’espace francophone ».
> Il lui est également demandé « de renforcer les capacités de l’expertise de l’OIF en matière de facilitation et de médiation, notamment par l’identification et la mobilisation des compétences ainsi que par l’échange d’expériences et la mise en œuvre de programmes de formation ».
> Il lui est encore demandé « d’assurer une plus forte participation de nos pays francophones aux Opérations de Maintien de la Paix, en étroite coopération avec l’ONU et les Organisations régionales compétentes » (c’est-à-dire surtout l’Union Africaine et l’Union Européenne).

Ces orientations, voire ces directives, ne peuvent qu’être approuvées. La question qui se pose est simplement celle des moyens indispensables pour les mettre en application.

Organiser un système d’alerte précoce pour détecter les risques de crise, mener des médiations pour désamorcer des conflits naissants, envoyer des missions d’observation, former des facilitateurs, des médiateurs et des observateurs, tout cela en étroite liaison avec les Organisations internationales comme les Nations Unies, l’Union Africaine et ses organisations sous-régionales, ou encore l’Union européenne, sans oublier les principaux pays directement ou indirectement impliqués dans les crises, cela suppose de disposer d’un réseau diplomatique solide, d’experts compétents et des budgets nécessaires.

L’OIF ne dispose pas, à ce jour de tels moyens. Le premier défi à relever, ou plutôt le premier risque à conjurer est celui d’un « grand écart » entre les objectifs annoncés et les capacités à les atteindre.

Il existe un second risque : c’est celui de ne pas être en mesure de fixer une position claire de l’Organisation sur certaines crises ou certains conflits.

Il y a à cet égard un exemple douloureux, que nous venons de vivre, et qui est celui du Liban.
Voilà que, peu après l’ambitieuse déclaration de Saint-Boniface et son affirmation –fortement soutenue par le Canada de « la responsabilité de protéger », l’un des pays fondateurs de la Francophonie, le Liban, se trouve pris dans une terrible tragédie. A-t-on entendu la voix de l’OIF durant les semaines où tout cela s’est déroulé ?

Ce n’est pas faute pour le Secrétaire Général, le Président Abdou Diouf, d’avoir tenté de susciter des initiatives, évidemment. Ce que l’on a pu constater, en revanche, c’est l’impossibilité de dégager une position commune entre les Etats membres de l’OIF, ou du moins certains d’entre eux. Les pays arabes, tels l’Egypte ou la Tunisie, d’un côté, certains pays affichant leur soutien à l’opération israélienne, tel le Canada, de l’autre, se sont mutuellement neutralisés et ont, de fait, paralysé l’OIF.

On rencontre là les limites du processus de l’élargissement permanent du nombre des pays membres, encourageant à certains égards, mais par ailleurs menaçant pour l’homogénéité et la cohérence de l’Organisation dès lors que cet élargissement touche à des sujets sensibles de la politique internationale. Et la préservation de la paix ou son rétablissement sont bien au nombre de ces sujets sensibles.

Je note au passage que la question que je viens d’évoquer, celle de l’approfondissement ou de l’élargissement, ne concerne pas que la Francophonie. C’est aussi, comme vous le savez, un problème qui concerne la construction européenne.

Je ne voudrais pas vous laisser sur ce seul constat et sur des interrogations sans exprimer mon sentiment, en guise de conclusion. Je le fais naturellement à titre personnel, ce qui m’autorise la liberté de parole dont j’ai usé ce soir devant vous depuis le début.
Je considère que la Francophonie est un réel succès. Personne n’aurait pu penser, lorsque le projet en a été conçu, il y a une quarantaine d’années, qu’elle deviendrait une Organisation internationale regroupant plus du tiers des pays représentés à l’ONU et que des Etats comme la Grèce ou l’Autriche demanderaient à y être associés.

Ce succès est dû à la force des valeurs sur lesquelles elle repose, des valeurs et des principes exprimés par les fondateurs de la Francophonie et par tous ceux qui les ont suivis. C’est bien la preuve que la langue française n’est pas qu’un moyen de communication et qu’on a raison de dire qu’elle est tout autant porteuse d’idées et de valeurs que de mots.
Mais la Francophonie, du fait même de ce succès, se trouve à un moment de son évolution où elle doit engager une réflexion sur ses priorités et sur ses moyens.

Sur ses priorités d’abord :

Je pense personnellement qu’elle doit hiérarchiser ses ambitions et se concentrer sur ses objectifs fondamentaux, je dirais même ses objectifs vitaux.

Le premier est celui de la langue française, de la diffusion de son enseignement dans le monde et d’abord au sein des pays membres de la Francophonie eux-mêmes. La politique d’enseignement des langues dans les pays membres est une affaire capitale, qui mérite d’être au centre de l’action de l’Organisation. Il y a trop de pays membres dont les programmes scolaires réservent une place très secondaire au français. Je n’ai pas le temps de développer ce point ce soir, mais je crois par exemple à la nécessité de promouvoir l’enseignement de deux langues étrangères obligatoires, dont le français.

Toujours, au chapitre de la diffusion de la langue française, il faut impérativement que le français se lance hardiment à la conquête d’Internet et des nouveaux moyens de communication et d’information. Il n’est pas acceptable que l’on trouve plus de sites en langue coréenne qu’en langue française sur Internet.
J’ajoute que la chaîne de télévision de la Francophonie, TV5 Monde, devrait elle aussi recevoir les moyens de se développer sur toute la planète, car c’est un vecteur de pénétration de la langue très efficace.
Le second pilier de la Francophonie, à mon sens, est le combat pour le respect de la diversité culturelle. Nous serons plus forts, nous francophones, si nous ne sommes pas seuls, si nous défendons aussi le droit des autres langues internationales et des autres cultures à vivre et à créer. C’est tout l’enjeu de la Convention sur la diversité culturelle, votée à l’UNESCO, mais qui doit maintenant être ratifiée par suffisamment de pays pour entrer en vigueur. Et il faudra ensuite se battre pour qu’elle soit appliquée et respectée.

Et ce n’est pas gagné d’avance !
Le troisième pilier de la Francophonie est celui de la promotion des droits de l’homme et des libertés. Cela passe par le renforcement des systèmes judiciaires et des institutions démocratiques en général, grâce à des programmes de formation, d’équipement et de soutien. Je ne développe pas.
Pour les autres domaines, et notamment pour ce qui relève de la prévention et du traitement des crises, je ne pense pas, évidemment, que la Francophonie doive s’en désintéresser. D’ailleurs on le lui reprocherait.
Mais elle n’a pas les moyens de s’y impliquer partout et complètement.
Il y a des cas où sa médiation peut être utile et même précieuse. Je pense au rôle qu’a joué le Président Abdou Diouf pour désamorcer une nouvelle crise aux Comores en 2003 et depuis lors, par exemple. Dans des cas comme celui-là, souvent en liaison avec d’autres organisations internationales, la Francophonie peut être un acteur efficace de la paix dans le monde.
Mais pour le reste, je crois beaucoup plus dans la capacité de la Francophonie de jouer un rôle de levier, d’avoir une stratégie d’influence ou, dit de façon plus crue, d’être un groupe de pression efficace dans les instances internationales chargées de traiter les problème de sécurité, en particulier les Nations Unies. C’est particulièrement vrai, lorsque les pays concernés par des crises sont des pays eux-mêmes membres de la Francophonie.

Cela suppose bien entendu un travail de concertation intense à l’intérieur de la Francophonie, pour dégager, chaque fois que possible, des positions communes. Peut-être aurait-on moins de grandes déclarations, parfois purement verbales, adoptées dans les vastes « grand-messes » que sont devenus les Sommets de Chefs d’Etat et de Gouvernement, et davantage d’initiatives concrètes même si elles sont plus ponctuelles.
Avec le recentrage sur les priorités, j’avais évoqué la question des moyens de la Francophonie. Cela ne nécessite pas de longs développements. Je dirai simplement qu’il n’est pas normal, qu’il n’est pas sain, que l’Organisation Internationale de la Francophonie soit financée à 75% par un seul pays, la France, alors que l’Organisation a près de 70 Etats-membres. Même en se concentrant sur les piliers que j’ai énumérés, la Francophonie a besoin de plus de moyens financiers pour être efficace. Mais l’effort doit être mieux réparti.

Telles sont, Mesdames, Messieurs, les réflexions que je voulais vous présenter, sur un sujet qui, comme vous, me passionne et qui mérite de mobiliser l’attention et l’engagement de tous les francophones puisque nous nous battons pour une belle et grande cause : la construction d’un monde où le dialogue entre les langues et les cultures soit source de tolérance, de paix et de progrès.

Je vous remercie de votre attention.

Annexe :
Liste des membres de plein droit, associés et observateurs de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement des pays ayant le français en partage
XI° Sommet de la Francophonie, Bucarest, 28-29 septembre 2006:
68 États et gouvernements membres, 53 États et gouvernements membres de plein droit (Albanie, Andorre, Belgique, Bénin, Bulgarie, Burkina Faso, Burundi, Cambodge, Cameroun, Canada, Canada-Nouveau-Brunswick, Canada-Québec, Cap-Vert, République centrafricaine, Communauté française de Belgique, Comores, Congo, République démocratique du Congo, Côte d’Ivoire, Djibouti, Dominique, Égypte, Ex-République yougoslave de Macédoine, France, Gabon, Grèce, Guinée, Guinée Bissau, Guinée équatoriale, Haïti, Laos, Liban, Luxembourg, Madagascar, Mali, Maroc, Maurice, Mauritanie, Moldavie, Monaco, Niger, Roumanie, Rwanda, Sainte-Lucie, Säo Tomé et Principe, Sénégal, Seychelles, Suisse, Tchad, Togo, Tunisie, Vanuatu, Vietnam), 2 États associés (Chypre, Ghana), 13 États observateurs (Arménie, Autriche, Croatie, Géorgie, Hongrie, Lituanie, Mozambique, Pologne, Serbie, Slovaquie, Slovénie, République tchèque, Ukraine).

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